Guy de Compiègne publiait en 2013 un remarquable essai, Poussin et les maîtres du jardin japonais.
Dans un nouvel ouvrage à paraître dans quelques jours, Nicolas Poussin L’ambiguïté recherchée, l’architecte amoureux de Poussin poursuit son travail de recherche et nous propose cette fois une analyse des détails que le maître a intégrés à ses compositions, nous obligeant à reconsidérer ses sujets sous un éclairage totalement inattendu.
Nous avons rencontré l’auteur pour en savoir un peu plus, en attendant de pouvoir nous plonger dans son nouveau livre.
Pourriez-vous nous présenter ce nouvel essai sur Nicolas Poussin ?
C’est un nouvel essai qui reprend et complète les études que j’ai faites sur l’interprétation des tableaux de Nicolas Poussin.
Cette fois-ci, après avoir abordé ces tableaux d’un point de vue géométrique, résultat d’une expérience personnelle en tant qu’architecte, je me suis concentré sur l’ambiguïté.
Le terme d’ambiguïté évoque le double sens, et pour Poussin c’est un mode de communication qui lui permet d’évoquer, à partir du sujet principal, un autre sujet reflétant probablement son point de vue.
Votre précédent livre, Le Chemin du Regard, abordait l’oeuvre de Poussin d’une manière tout à fait originale et très didactique. Ce nouvel essai est-il dans la même veine ?
L’ouvrage précédent se concentrait sur ce que l’on pouvait tirer comme interprétations à partir des compositions géométriques. C’était une approche un peu particulière, que j’avais complétée par une évocation des jardins japonais. Bien évidemment tout ceci donnait à cet ouvrage un côté un peu exotique, mais je pense que c’était une approche tout à fait valide car en apportant un éclairage sur la composition des jardins japonais, on découvrait finalement des thèmes communs : un sujet aidait l’autre et nous arrivions, en fin de lecture, à une meilleure compréhension de l’œuvre de Poussin et des jardins japonais.
Avec ce livre je recherche, tout aussi systématiquement, au fond des tiroirs, à l’arrière-plan ou en marge de la peinture, le ou les détails ne semblant pas illustrer le sujet principal, pour ensuite me questionner sur leurs raisons d’être.
Je pense que la préoccupation majeure de Nicolas Poussin, c’est l’ordre. Et pour créer un ordre visuel il faut éviter la confusion, or l’ambiguïté crée une confusion de fait. Poussin va donc mettre ces éléments dans des endroits du tableau qui ne sont pas perçus au premier abord, afin de hiérarchiser la lecture de son tableau.
En s’attachant à trouver une signification à partir d’un texte biblique ou une référence historique, on s’aperçoit que l’évocation qu’il induit par ces détails se rattache à un autre culte ou à une situation politique du moment, comme pour le Coriolan des Andelys.
Remis bout à bout, ces détails permettent de se rendre compte d’un autre sujet, qui me semble être le point de vue personnel de Nicolas Poussin.
Le livre sort au moment où le Louvre va consacrer une exposition au peintre, « Poussin et Dieu ». Quel éclairage sur la peinture religieuse de Poussin proposez-vous ?
Si vous regardez l’ensemble des oeuvres de Poussin vous vous apercevez que plus des trois quarts traitent de l’univers religieux au sens large.
Je ne sais pas encore comment le Louvre organisera son exposition mais je crois comprendre qu’il se concentre sur la partie chrétienne. Pour ma part je pense qu’il est absolument impossible de s’y limiter sans mettre sur le même plan les autres religions, et j’irais même plus loin, sans s’intéresser aux autres cultes, et notamment au culte de Vénus qui avait fait l’objet d’un de mes articles sur votre site.
Il faut se rappeler qu’en vivant à Rome, Poussin voit continuellement sous ses yeux de nombreuses églises construites sur les ruines d’anciens temples. Ce qu’il voit, avec des yeux toujours perçants, c’est une ville éternelle ayant réussi à intégrer physiquement tous les cultes.
Peut-être avait-il la même ambition pour son œuvre ? J’ai donc regardé et analysé les tableaux religieux présentant cette complexité, cette juxtaposition ambiguë de religions.
Ce nouvel essai est un événement ; avez-vous fait des découvertes ?
Je me suis attaché à ce que l’œil voit et j’ai cherché à comprendre ce que le détail veut nous suggérer. On s’aperçoit que les sous-thèmes évoqués par l’ambiguïté du détail n’ont parfois rien à voir avec l’histoire de l’art.
Vous le verrez vous-même dans l’ouvrage, il y a des sujets qui sont tout à fait liés au sujet principal… mais décalés. Ils ne sont pas là où on les attend, et cela procure un plaisir certain chez ceux qui, comme moi, s’intéressent à l’homme derrière le peintre.
Nicolas Poussin L’ambiguïté recherchée (24 EUR) est disponible en librairie et peut également être commandé en contactant directement les Éditions du Varulv.
Les librairies où vous trouverez le livre Nicolas Poussin L’Ambiguïté Recherchée :
• Librairie du Louvre
• L’écume des Pages
• Galignani
• Disponible chez l’auteur